Femme

n.f. 1. Etre humain du sexe féminin, du sexe qui met au monde des enfants ...


Peu de femmes dans les Voyages Extraordinaires et particulièrement dans les Voyages les plus célebres !
Pourtant si les femmes sont peu présentes, elles sont loin d'être absentes et sont même parfois les héroïnes principales de certains romans. Ainsi Miss Helena Campbell qui refuse l'amour avant d'avoir vu "Le Rayon Vert"... D'autres héroïnes sont plus troublantes encore, telle Myra, condamnée pour toujours à l'invisibilité dans la version originale du "Secret de Wilhelm Storiz". La fiancée invisible (titre envisagé un moment par Verne pour ce roman) épousera Marc Vidal, un peintre portraitiste. Et le visage de Myra, Marc Vidal ne pourra plus le voir que que dans un portrait de la jeune femme qu'il a peint lui-même.
Femme vivante invisible... et femme visible morte comme dans le "Chateau des Carpathes" ou l'inquiétant Rodolphe de Gortz emprisonne l'âme de la Stilla, divine cantatrice. Frank de Telek, amoureux fou de la Stilla, parvient à pénêtrer dans le chateau du baron pour la libérer...

Franz vint se se poster devant le fauteuil. Il n'avait plus qu'un pas à faire pour saisir le baron de Gortz, et, le sang aux yeux, la tête perdue, il levait la main...
Soudain la Stilla apparut.
Franz laissa tomber son couteau sur le tapis.
La Stilla était debout sur l'estrade, en plein lumière, sa chevelure dénouée, ses bras tendus, admirablement belle dans son costume blanc de l'Angélica d'Orlando, telle qu'elle s'était montrée sur le bastion du burg. Ses yeux, fixés sur le jeune comte, le pénétrait jusqu'au fond de l'âme
Il était impossible que Franz ne fut pas vue d'elle, et, pourtant, la Stilla ne faisait pas un geste pour l'appeler... elle n'entrouvrait pas ses lèvres pour lui parler... Hélas ! Elle était folle !
Franz allait d'élancer sur l'estrade pour la saisir entre ses bras, pour l'etrainer au dehors...
La Stilla venait de commencer à chanter. Sans quitter son fauteuil, le baron de Gortz s'était penché vers elle. Au paroxysme de l'extase, le dilletante respirait cette voix comme un parfum, il la buvait comme une liqueur divine. Tel il était autrefois aux repésentations des théâtres d'Italie, tel il était alors au milieu de cette salle, dans une solitude infinie, au sommet de ce donjon, qui dominait la campagne transylvaine.
Oui, la Stilla chantait !... Elle chantait pour lui... rien que pour lui !... C'était comme un souffle s'exhalant de ses lèvres, qui semblaient être immobiles.. Mais si la raison l'avait abandonnée, du moins son âme d'artiste lui était-elle restée toute entière !
Franz, lui aussi, s'enivrait du charme de cette voix qu'il n'avait pas entendu depuis cinq longues années... Il s'absorbait dans l'ardente contemplation de cette femme qu'il croyait ne jamais revoir, et qui était là, vivante, comme si quelques miracle miracle l'eût ressucité à ses yeux !
Et ce chant de la Stilla, n'était-ce pas entre tous celui qui devait faire vibrer plus vivement au coeur de Franz les cordes du souvenir ? Oui ! Il avait reconnu le finale de la tragique scène d'Orlando,ce finale où l'âme de la cantatrice s'était brisé sur cette dernière phrase :

Innamorata, mio cuore tremante,
Voglio morire


Franz la suivait note par note, cette phrase ineffable... Et il se disait qu'elle ne serait pas interrompue, comme elle l'avait été sur le théâtre de San Carlo !... Non !... Elle ne mourrait pas entre les lèvres de la Stilla, comme elle était morte à sa représentation d'adieu
Franz ne respirait plus... Toute sa vie était attachée à ce chant... Encore quelques mesures, et ce chant s'achèverait dans toute son incomparable pureté...
Mais voici que la voix commence à faiblir... On dirait que la Stilla hésite en répétant ces mots d'une douleur poignante :

Voglio morire

La Stilla va-t-elle tomber sur cette estrade comme elle est autrefois tombée sur la scène ?...
Elle ne tombe pas, mais le chant s'arrête à la même mesure, à la même note qu'au théâtre de San Carlo... Elle pousse un cri... et c'est le même cri que Franz avait entendu ce soir là...
Et pourtant, la Stilla est toujours là, debout, immobile, avec son regard adoré, -ce regard qui jette au jeune comte toutes les tendresses de l'âme...
Franz s'élance vers elle... Il veut l'emporter hors de cette salle, hors de ce château...
A ce moment, il se rencontre face à face avec le baron, qui venait de ce relever.
"Franz de Telek !... s'écrie Rodolphe de Gortz. Franz de Telek qui a pu s'échapper..."
Mais Franz ne lui répond même pas, et, se précipitant vers l'estrade :
"Stilla... ma chère Stilla, répéte-t-il, toi que je retrouve ici... vivante...
- Vivante... la Stilla... Vivante!..." s'écrie le baron de Gortz.
Et cette phrase ironique s'achéve dans un éclat de rire, où l'on sent tout l'emportement et la rage.
" Vivante !... reprend Rodolphe de Gortz. Eh bien ! que Franz de Telek essaie donc de me l'enlever !"
Franz a tendu les bras vers la Stilla, dont les yeux sont ardemment fixés sur lui...
A ce moment, Rodolphe de Gortz se baisse, rammasse le couteau qui s'est echappé de la main de Franz, et il se dirige vers la Stilla immobile...
Franz se précipite sur lui, afin de détourner le coup qui menace la malheureuse folle.
Il est trop tard... le couteau frappe au coeur...
Soudain, le bruit d'une glace qui se brise se fait entendre, et, avec les mille éclats de verre, dispersés à travers la salle, disparaît la Stilla...


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